J’ai vu hier « Memento », un des tout premier films de Christopher Nolan, à qui l’on doit par la suite l’excellent « The Prestige » et surtout « Batman Begins » puis « The Dark Night » qui ont relancé avec éclat une franchise déclinante, voire décadente. « Memento » raconte l’histoire étonnante d’un homme qui à la suite d’un choc ne peut plus utiliser sa mémoire court terme. Au bout de quelques instants, toute nouvelle information s’efface de sa mémoire et il se voit donc obligé de noter, photographier, tatouer toute information dont il désire se souvenir. Cet homme a perdu sa femme lors d’une agression sauvage et n’a de cesse que de tenter de retrouver son meurtrier, en tentant de compenser autant qu’il le peut son handicap mémoriel.
Au delà du pitch initial, ce qui fait la particularité de ce film c’est sa réalisation. En effet, le film comporte deux dimensions : chronologique et antichronologique. Je m’explique : le film commence par la fin, puis remonte de scène en scène (en couleur) vers une scène clé qui permet de comprendre toute ce qui vient de précéder (ou suivre…). La durée de chaque scène correspond à la durée maximale de mémorisation du personnage, ce qui fait que lorsqu’une nouvelle scène commence il ne se souvient absolument pas de ce qui vient de se produire. Pour corser le tout, en parallèle, d’autres scènes (en noir et blanc) avancent dans un ordre chronologique cette fois vers cette scène clé qui explique donc ce qui suivra. Compris ?
J’ai trouvé ce film brillamment réalisé et les réflexions soulevées sur la mémoire passionnantes. Jusqu’où peut-on se fier à notre mémoire ? Quel est son degré de subjectivité ? Et si d’autres la manipulaient ? La mémoire est effectivement une composante fondamentale de notre rapport au monde. Elle flanche, et c’est toute notre manière de vivre et appréhender le monde et les autres qui bascule.
Cependant, il faut bien s’accrocher pour tout comprendre et je pense qu’un second visionnage est nécessaire car l’auteur a laissé ouvert au cours de cette scène clé du milieu de nombreuses possibilité.
Un film a voir en bonne forme intellectuelle !
Sur ce thème, je vous recommande aussi « Total Recall » et « Paycheck », tirés tous deux de nouvelles de Philip K.Dick.